Alger (AFP) – Le Parlement algérien a pris une décision audacieuse, se préparant à adopter une proposition de loi qui qualifie la colonisation française (1830-1962) de 'crime d'État'. Ce vote intervient dans un contexte de tensions persistantes entre les deux nations.
La loi, dont le contenu a été largement diffusé, appelle la France à présenter des excuses officielles et à indemniser l'Algérie, tout en mettant en lumière la 'responsabilité juridique' de l'État français envers les souffrances liées à son passé colonial en Algérie. En cas d'adoption, ce texte aurait une forte résonance symbolique, bien que son impact sur des demandes de compensation semble limité.
Brahim Boughali, président de l'Assemblée populaire nationale (APN), a déclaré que cette initiative était 'un acte souverain par excellence' et un message fort, tant sur le plan national qu'international, sur la non-négociabilité de la mémoire algérienne. Cette déclaration souligne comment le passé colonial continue de peser sur les relations entre la France et l'Algérie.
Expert en histoire coloniale, Hosni Kitouni, de l'université d'Exeter, a commenté que bien que cette loi n'ait pas de portée internationale, son poids politique et symbolique est indéniable, signalant une 'rupture' dans la relation mémorielle entre les deux pays. Il estime que ce vote pourrait marquer une nouvelle ère dans le dialogue historique entre Paris et Alger, un dialogue chargé d'émotions et de sensibilités.
Les tensions entre la France et l'Algérie trouvent leurs racines dans les traumatismes de la colonisation, une période marquée par des violences massives et la destruction des structures socio-économiques algériennes. La guerre d'indépendance de 1954 à 1962, qui a coûté la vie à environ 1,5 million d'Algériens, est encore un sujet sensible. En 2017, le président français Emmanuel Macron avait qualifié la colonisation de 'crime contre l'humanité', un aveu qui avait alarmé certains cercles en France tout en résonnant avec une partie de la société algérienne.
Cette initiative survient alors que les relations franco-algériennes sont particulièrement tendues, particulièrement après l'annonce de la France, prévue pour l'été 2024, d'un plan d'autonomie pour le Sahara occidental. Des incidents récents, tels que l'incarcération de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, ne font qu'accentuer ces tensions.
La proposition de loi réclame également des réparations pour les dommages matériels et moraux causés par la colonisation, ainsi qu'une décontamination des sites d'essais nucléaires dans le Sahara, réalisés par la France entre 1960 et 1966. Elle appelle aussi à la restitution des biens culturels et des archives nationales. De plus, elle prévoit des sanctions pour ceux qui nieraient la nature criminelle de la colonisation, établissant un cadre légal autour de ce sujet complexe.
En somme, cette proposition de loi pourrait marquer un tournant dans le périple mémoriel entre l’Algérie et la France, alors que les anciens colonisés cherchent une reconnaissance et une justice pour un passé douloureux.







