Après des décennies de prestiges, la Maison Poursin, fabricant de pièces en laiton fondé en 1830, est au bord de l’extinction. Karl Lemaire, son actuel propriétaire, exprime son désespoir face à la "zara-ification" du secteur du luxe, un phénomène où des grandes marques abandonnent le savoir-faire artisanal au profit de matériaux moins coûteux et importés, notamment de Chine.
Dans un courriel récent, un client de longue date a annoncé la cessation de sa collaboration avec Poursin, préférant se tourner vers l’importation d’acier inoxydable. "Nous remplaçons les métaux nobles par un acier moins cher, sous prétexte d’éco-responsabilité", déplore Lemaire. Les choix des marques de luxe reflètent une réalité économique souvent ignorée : l’acier inoxydable est proposé à 1,50 € le kilo contre 10 € pour le laiton, ce qui entraîne une course au profit au détriment de la qualité et de l’histoire.
Le laiton, en plus d’être recyclable à plus de 90 %, possède de nombreuses qualités telles que sa résistance à la rouille et ses propriétés antibactériennes. Autrefois, des personnalités telles qu’Émile Hermès et Louis Vuitton venaient spécifiquement chez Poursin pour choisir leurs pièces. À l’époque, la manufacture fournissait également des équipements aux soldats français, rappelant son enracinement dans l’histoire et le patrimoine français.
Cependant, une tendance inquiétante s'est installée. Des marques qui devraient représenter le savoir-faire français s’alignent sur les normes de production plus faciles et moins coûteuses de leurs concurrentes asiatiques. Les règles européennes encadrent la galvanisation des métaux, mais, paradoxalement, la dépendance à des matériaux importés s’accentue, comme l’indique une étude de France 24. Les questions éthiques sur l’extraction et le traitement de ces métaux en Chine demeurent souvent sans réponse.
Pour Lemaire, l’avenir de la Maison Poursin semble troublant. "La logique économique me pousserait à délocaliser, mais je ne peux renier tout ce que représente cette manufacture", confie-t-il. Les portes de Poursin, ouvertes lors des journées du patrimoine, attirent encore de nombreux visiteurs, témoignant de l’intérêt pour cet héritage. Mais pourrait-elle devenir un musée, où l’artisanat se transforme en simple attraction touristique? Les défis à relever sont nombreux, mais la passion pour un savoir-faire authentique demeure la force de ceux qui luttent pour le préserver.







